De moins de 3€ à plus de 10 000€, le prix d’une bouteille de vin peut fortement varier et un prix élevé ne garantit pas forcément un vin de meilleure qualité. Mais alors, quels sont les facteurs qui déterminent un tel écart ? D’où vient le prix d’une bouteille de vin ?
En 2019, l’intouchable Romanée-Conti en Bourgogne a été détrônée par le Bordelais Liber Pater avec une bouteille à 30 000€, du réputé millésime 2015, à seulement 250 exemplaires, première cuvée 100% franc-de-pied issue d’un assemblage de cépages historiques de Bordeaux non-greffés (préphylloxériques).
PREMIER FACTEUR LOGIQUE
Son coût de revient qui se calcule en prenant en compte tous les paramètres entraînent des frais pour la production du vin en question.
Détaillons-les en trois sujets :
1. Les raisins
- Le prix du foncier : le prix d’un hectare de vigne sur la Côte des Blancs en Champagne, ou dans les grands crus de Bourgogne ou de Bordeaux, n’est pas comparable à celui de vignobles moins prestigieux du Languedoc ou de la Loire. La qualité exceptionnelle de certains terroirs, les classements historiques font grimper le prix de l’hectare de manière parfois vertigineuse !
Par exemple un hectare de vigne en Champagne Premiers crus vaut environ 1,4 million d’euros, alors qu’un hectare de vigne en Touraine dans le Val de Loire vaut environ 10 000 euros. - L’achat et l’amortissement de la plantation, le premier rendement arrive environ 3 ans après la plantation des vignes.
- Les frais de conduite du vignoble (taille, entretien des sols, travaux en vert, traitements…)
- Les vendanges (manuelles ou mécaniques).
Certains vignobles non mécanisables en raison de cahier des charges ou leur topographie pentue (où les vendanges se font parfois en rappel (!), comme en Alsace ou en Côte-Rôtie) entraînent des coûts plus élevés.
Les charges du personnel représentent une part importante de ces montants.
Si les viticulteurs sont capables de partager la main-d’œuvre ou les machines, des économies sont possibles. - Le rendement qui correspond au nombre d’hectolitres de vin produits sur un hectare de vignes. Si le rendement est faible, la qualité du raisin (et donc du vin) sera meilleure et le prix du vin sera impacté à la hausse. Le meilleur exemple est celui des vins blancs doux comme le Sauternes, où les grains sont minutieusement sélectionnés lors des vendanges (avec plusieurs passages) avec un rendement par hectare très faible.
- Le millésime : La qualité de la récolte varie chaque année selon les conditions météorologiques et les aléas climatiques (canicule, gel, grêle, pluie trop abondante…) qui peuvent entraîner une perte partielle ou totale de la récolte et générer une étape de tri importante. La qualité du vin qui en découle est directement impactée : certains millésimes sont beaucoup plus réputés que d’autres et le prix du vin augmente en conséquence.
2. La vinification et la mise en bouteille
- Amortissement du matériel,
- Produits œnologiques,
- Frais d’analyses,
- Cuves, barriques (un fût neuf coûte entre 600 et 1000€ !),
- La durée de conservation du vin avant sa mise en vente peut être également coûteuse ! Certains vins sont élevés pendant plusieurs mois ou plusieurs années, que ce soit par exigence du cahier des charges ou par la volonté du vigneron. L’entretien des installations de stockage peut être onéreux. Sans parler de l’immobilisation des stocks qui ne peuvent donc être vendus et générer un profit immédiat !
- Matières sèches (bouteilles, bouchons, capsules, étiquettes, cartons…). Certaines formes de bouteilles font augmenter les coûts et nécessitent parfois un équipement supplémentaire.
- Charges du personnel.
3.La commercialisation
- Le transport, sauf pour les producteurs qui ne vendent leurs vins qu’aux clients qui visitent leur cave.
- Les taxes : presque tous les gouvernements taxent les boissons alcoolisées. C’est une façon de contrôler la consommation d’alcool car le prix final est plus élevé pour les consommateurs ! Selon les pays, le niveau de la taxe varie beaucoup et peut augmenter de façon impressionnante le prix d’une bouteille !
- Les marges des revendeurs : cavistes, restaurants qui ont eux-mêmes besoin de faire du profit sur ces ventes.
- Les dépenses liées au marketing, à la communication, la participation à des salons…
Évidemment, si l’exploitation produit des rendements élevés à l’hectare, ces coûts seront moins élevés à la bouteille…
AUTRES FACTEURS MOINS « MATHÉMATIQUES »
- La classification du vin : Vin de France, IGP (Indication Géographique Protégée) et AOC/AOP (Appellation d’Origine Contrôlée/Protégée) : chaque catégorie a son cahier des charges et donc ses contraintes d’élaboration qui peuvent faire varier le coût d’élaboration.
- Le prix que le consommateur est prêt à payer : le poids de l’offre et de la demande pèse lourd dans la balance du prix : notations, millésimes, éditions limitées… Lorsqu’il y a une forte demande pour un vin dont l’offre est limitée, le prix de détail peut largement dépasser les coûts. Si certaines entreprises viticoles sont rentables, d’autres peuvent être difficulté en raison du manque de demande. Un exemple connu, celui de certains vins de Moselle : les coûts de leur élaboration étant très élevés, en raison de l’escarpement des vignobles, les producteurs étaient obligés de fixer des prix que les consommateurs n’étaient pas prêts à payer…
- La capacité de garde du vin : plus un vin se conserve longtemps, plus sa valeur augmente avec les années.
- La notoriété du domaine et du vigneron : les plus réputés peuvent pratiquer des tarifs plus élevés. L’exemple du classement de 1855 à Bordeaux ou des climats de grands crus bourguignons démontre que la notoriété des châteaux et domaines qui y figurent bénéficient d’une belle notoriété et pratiquent des tarifs élevés.
Et vous, quel prix seriez-vous prêt à mettre pour une bouteille de vin ?
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Rédactrice : Isabelle Johanet