Durant l’Antiquité, le vin ne se buvait pas dans des verres transparents tels qu’on les connait aujourd’hui mais dans un cratère en terre cuite. La vue n’était pas le sens premier de la dégustation. Dans notre monde actuel, nos yeux font face à une hyperstimulation informationnelle et même promotionnelle (Chaque jour, nous voyons en moyenne, 1 200 messages publicitaires, selon radio France Culture, 2018). Alors, la vue devrait-elle être privilégiée lors d’une dégustation ?
Honneur à l’odorat
Dernièrement, des chercheurs américains et australiens ont montré dans une expérience, que la diffusion de musique classique dans une cave à vins avait tendance à augmenter le montant des achats des clients, un amorçage auditif incitant notre inconscient à associer le produit à des mots clés comme « prestige » et « raffinement ».
Alors, quel sens préférer lorsque l’on déguste du vin ? La vue, le nez, le toucher en bouche, l’écoute de l’ambiance ? Dans quel ordre ?
Les méthodes de dégustation dite classiques, parues après-guerre avec l’importance de l’œnologie se développent peu à peu pour faire face à la création des systèmes d’Appellation d’Origine Contrôlée dès les années 1930. Pour éviter les conflits entre les régions viticoles et leurs AOCs, des comités de dégustation sont mis en place selon une analyse organoleptique du vin. Avant-guerre, l’odorat n’était pas un sens utilisé pour décrire un vin : on parlait de robe et de notion tactile en bouche.
Le vigneron du Beaujolais et scientifique Jules Chauvet s’intéresse à une méthode de dégustation avec un cadre plus scientifique pour assurer des comités d’évaluations objectifs au moyen de procédés d’analyse sensorielle. A cette même époque (1970) apparaît le verre INAO en forme de tulipe, conçu par l’Institut et en collaboration avec Jules Chauvet afin d’assurer une analyse du bouquet des vins. L’odorat est à l’honneur ! Cette méthode est devenue une référence mondiale dispensée dans de nombreuses écoles de formation et aux certifications reconnues comme le WSET.
La dégustation géo-sensorielle, une histoire et une méthode perdue à la Révolution Française
Pour garantir l’origine du vin, objet de commerce, la « Compagnie des Courtiers Gourmets Piqueurs de Vin » est créée sous Philippe Le Bel qui officialise le métier de gourmet en 1312, métier qui disparaitra à la Révolution en 1789. Le gourmet contrôle et valide l’origine des vins par la reconnaissance en bouche des terroirs et des climats. Leur expérience leur permet de goûter le vin et de l’identifier par le toucher en bouche avec le tastevin comme outil de dégustation.
Dans les années 1980, de nombreux vignerons et professionnels du monde œnologique veulent faire face à l’industrialisation et redonner place à la nature et au terroir en remettant cette technique de dégustation au goût du jour. Les recherches sur les perceptions du cerveau et des saveurs se poursuivent et des données scientifiques, partagées ces dernières années par de nombreux chercheurs questionnent la dégustation sensorielle classique.
La dégustation géo-sensorielle semble plus appropriée et complémentaire à la méthode d’analyse sensorielle car c’est une approche pour identifier les vins de lieu et non-lieu, ayant pour but de reconnaître le terroir, invitant le dégustateur à se concentrer sur la salivation. Elle repose sur le principe que la salivation reflète l’énergie du vin.
Cette facette passionnante de la dégustation permet de détecter les grands types de sols et sous-sols se cachant derrière les vins : calcaires, siliceux, granitiques, volcaniques…, de découvrir les principaux terroirs viticoles et de conjuguer de nouveau la dégustation et la connaissance des terroirs.
Dans le prochain article, nous nous pencherons sur le fonctionnement du cerveau.
Si vous souhaitez en savoir plus sur la méthode et le CERTIFICAT DE DÉGUSTATION de Dégust’Emoi.
Rédactrice : Isabelle Johanet